Selon l’ami Wikipedia, un biopic est un film de fiction, centrée sur la description biographique d’un personnage principal ayant réellement existé. Bien que basé sur une histoire vraie, un biopic est une fiction. Ce n’est pas un documentaire (même s’il peut parfois en adopter les codes), tout simplement car il ne recherche pas la vérité. Comme tout film, il tente de divertir d’abord, pour faire passer un message, plus ou moins subtil, ensuite. De ce point de vue, divertissante, la vie de Tonya Harding l’est (à son insu) et elle aurait aussi bien deux/trois trucs à nous expliquer sur la vie. Alors, même si son nom ne vous dit rien, son biopic I, Tonya pourrait tout de même s’avérer un excellent choix de film pour une soirée ciné à la maison. Voici pourquoi.
Tout d’abord…
Les faits de l’espèce
Tonya Harding est une légende dans son domaine. Pour une très bonne raison. Tonya Harding est la première américaine à avoir accompli un triple axel en compétition. Mais aussi et surtout, la deuxième femme, au monde, à avoir réussi cet exploit en compétition. Vingt-sept ans plus tard, seulement six autres femmes se sont ajoutées à la liste. C’est dire la difficulté de l’exercice. Mais… Qu’est-ce-qu’un triple axel? Un triple axel, c’est ça (Tonya Harding réalisant un Triple Axel pour la première fois, lors des championnats des Etats-Unis de 1991):
Tonya Harding était patineuse artistique. Une des meilleures que le monde ait connu. Mais si comme moi, vous ne vous intéressez pas des masses au patinage artistique, sachez que Tonya Harding est une légende pour bien d’autres raisons. De très mauvaises raisons. En 1994, à quelques semaines des jeux olympiques d’hiver, elle est accusée d’avoir planifié une agression physique contre sa rivale, Nancy Kerrigan. Cette dernière avait reçu un violent coup au genou qui aurait pu mettre fin à sa carrière.
Tonya Haring a alors été condamnée à trois ans de prison en sursis, 500 heures de travaux d’intérêt général, une amende de 110 000 dollars, et une interdiction définitive de toute compétition. Face à une condamnation aussi lourde, on s’attend à ce que son implication dans l’affaire soit irréfutable. Pourtant, le mystère plane toujours. L’histoire est plus complexe qu’elle n’en a l’air. Et c’est la complexité autour d’événements en apparence évidents qui rende son histoire si passionnante.
La parole est à la défense…
Mensonges vs Vérité
I,Tonya aurait pu être un biopic banal. Mais à l’image de Tonya, il est tout sauf banal. L’intelligence du film réside dans le simple fait qu’il ne cherche jamais la vérité, mais essaie de rester au plus près de celle-ci. Alors que la vie de Tonya déroule sous nos yeux, le récit est entre-coupé de scènes où les protagonistes parlent à la caméra comme s’ils étaient interviewés. Le film a donc parfois des airs de documentaire (ou plutôt d’un mockumentary) surtout lorsqu’on comprend au générique de fin, que ces scènes reproduisent de vraies interviews de ces mêmes vraies personnes qui paraissent tout sauf vraies de par leur extravagance.
Par exemple, la mère de Tonya, LaVona Harding, merveilleusement jouée par Allison Janney (ENFIN OSCARISEE), fume comme un pompier, un tube à oxyen dans le nez et un perroquet sur l’épaule. Elle raconte sa version des faits, tout comme Tonya et son mari Jeff (Sebastian Stan, avis à tous les fans de Gossip Girl, il vous rappellera quelques bons souvenirs!). On a alors toutes les versions des faits sur la planification du délit. Mais leurs versions se contredisent, souvent, si ce n’est tout le temps. Et pourtant, c’est au milieu de tous leurs mensonges que se trouve la vérité. A vous de juger.
Au tour du Procureur, à présent…
Réalité vs Apparences
Le monde du patinage artistique peut paraître lointain pour toute personne lambda, mais à croire le portrait qu’en dresse le film, il n’a pas l’air si loin que ça. Tonya est douée, Tonya est exceptionnelle, Tonya est unique. Oui, mais Tonya n’est pas féminine, Tonya manque d’élégance, Tonya est bizarre. Et on nous le fait bien comprendre, on nout le montre explicitement.
Le film commence par une scène d’interview. Margot Robbie dans le personnage de Tonya Harding, nous parle crûment. Elle est mal assise sur une chaise dans sa cuisine modeste, une clope au bec malgré ses problèmes d’asthme. On aurait du mal à croire qu’elle a un jour pu être la meilleure patineuse artistique au monde. Mais Tonya est anti-conformiste et ne fait que ce qui lui chante. Elle est alors un excellent vecteur pour soutenir le vieil adage que « les apparences sont trompeuses ».
Toutefois, son histoire nous prouve que les apparences, parfois, comptent bien plus que le reste. C’est par ce biais que le film transcende le personnage. En plus de raconter son histoire exceptionnellement folle, le film s’attarde en filigrane sur des questions qui sonnent toujours d’actualités: les questions de genre, la répartition traditionnelle des rôles entre les sexes, les carcans de la féminité, les diktats inatteignables de beauté imposés aux femmes, la marginalité et l’exclusion sociale. Alors en recherchant votre version de la vérité, le scénario vous défie de ne pas juger sur l’apparence. Tout du moins, essayez.
Cette semaine, pour votre soirée cinéma à la maison, TheMoviewer vous conseille très fortement I, Tonya. Vous l’avez peut-être raté en salles. Film à « petit » budget, il n’a reçu qu’une distribution limitée malgré son « oscar buzz ». Captivant et divertissant, il ne vous décevra pas! « And that’s the fucking truth! », conclurait Tonya!